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                                                              CHAPITRE 8

                                                   — La gloire et le mépris

 

 

 

Les chanteuses en déshabillé qui se trémoussent sur scène sont devenues des modèles pour une multitude de jeunes filles… et pour bien des femmes aussi. Ce n’est un secret pour personne : elles fascinent. Elles incarnent une image de puissance et de liberté sexuelle qui attire. Pourtant, paradoxe cruel, la société condamne en même temps ce qu’elle applaudit. On valorise l’hypersexualisation des vedettes, mais on stigmatise les femmes qui, dans la « vraie vie », osent chercher le plaisir ou l’assumer publiquement.

La nudité des stars fait vendre. Elle remplit les salles, écoule des albums, propulse des films au box-office. Mais qu’une femme « ordinaire » tire profit de son corps ou de son charme — avec fierté, assurance et de son plein gré — et la réaction n’a plus rien à voir. Elle ne reçoit ni gloire ni applaudissements, mais plutôt suspicion et mépris.

Quelle différence réelle entre une pop star qui s’expose à moitié nue devant des milliers de spectateurs et une danseuse érotique qui fait le même geste devant un public restreint? Serait-ce simplement la mondanité? Le vernis de respectabilité que l’on accorde aux vedettes?

Sans ce paradoxe, d’ailleurs, l’interdit perdrait de son attrait. Le public adore ce qui choque autant qu’il attire. Mais derrière le discours d’« art » ou de « performance », tout repose sur la même logique : celle de l’argent. Ce qui passe pour audacieux sur une scène de concert devient « vulgaire » dans un bar.

Une femme qui affirme aimer son corps et en faire un outil de séduction et de revenus bouscule les normes. Si elle est plus âgée, c’est encore pire : elle s’oppose frontalement à l’humilité et à la retenue que la culture impose aux femmes. L’idée qu’une femme puisse tirer bénéfice de son corps heurte la morale dominante.

Alors, ont-elles vraiment le droit de s’affirmer, d’être fières d’elles-mêmes? La société persiste à envoyer le message inverse : confiance et sexualité affichée sont jugées suspectes. Et contrairement aux vedettes, les femmes qui vivent de leur charme sont étiquetées de « filles faciles », voire de « putes ». Un double standard grossier, qui camoufle en réalité des enjeux économiques et culturels beaucoup plus vastes.

Ces femmes sont d’ailleurs souvent prises pour cible et accusées d’être un mauvais exemple pour les jeunes filles, la cause directe de l’hypersexualisation de celles-ci.

Seulement, l’hypersexualisation n’est pas le fruit d’individus isolés : c’est un système nourri par des intérêts financiers colossaux. L’industrie du divertissement, de la mode et de la pornographie en tire profit chaque jour. Alors, plutôt que de pointer du doigt les femmes qui osent, peut-être faudrait-il regarder du côté de ce système — et du manque d’éducation critique qui l’accompagne.

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